Des élèves expliquent que “le monde est dirigé par les Illuminatis, qui sont eux-mêmes liés aux francs-maçons, aux juifs ainsi qu’aux grandes multinationales et aux Américains”. Ils rajoutent que “c’est pour cela qu’on ne peut pas se fier aux médias ni aux institutions politiques qui sont dirigées par ces forces de l’ombre.” Comment réagir ?
Il n’est pas évident, en tant que représentant de l’institution, de déminer un narratif complotiste. En effet, plus vous serez impliqué et convaincant dans les mots, plus vous risquez de confirmer les suspicions des jeunes, leur montrant à quel point le système de manipulation et de domination est étendu et puissant. En outre, comme les narratifs complotistes portent en général sur des éléments peu vérifiables, il est très difficile d’établir des faits sur lesquels réellement se baser, dans une réflexion et/ou une démarche collective.
Ce qui est en jeu dans les positions complotistes, c’est réellement la confiance en l’institution. Cela veut dire que, si vous travaillez la confiance dans votre relation aux jeunes, même localement, vous allez travailler ce lien de confiance, et construire les bases de pistes de solution.
Nourrir l’enquête, pas le sentiment de complot
Le second levier de travail est la capacité d’analyse des médias et des discours environnants. C’est essentiel, car, si les narratifs complotistes génèrent un « principe de méfiance », il n’est pas si difficile d’inviter les jeunes à appliquer le même principe à leurs propres sources. Une fois cette perspective ouverte, elle peut être nourrie de manière très adéquate par les différents outils du journalisme : recherche, analyse, comparaison, réflexion critique, synthétisation… (voir ressources).
Si vous parvenez à amener les jeunes à ce stade d’une dynamique de réflexion et d’investigation, se posera encore un challenge, celui de parvenir à trouver un équilibre entre la réflexion critique par rapport aux discours complotistes d’un côté, et le fait que les narratifs officiels doivent également et sérieusement être remis en question.
À court terme, écoute et maïeutique
À court terme, l’idéal est d’être dans une phase d’écoute et de questionnement pour vous intéresser aux discours des jeunes ainsi que pour les aider à identifier ce qui est réellement factuel dans leurs positions. Maïeutique (Annexe 8) et synthétisation au tableau vous seront très utiles dans cette perspective.
À moyen terme, cultiver la posture du chercheur
À moyen terme, il est plus qu’intéressant de faire une activité, un projet, une sortie… qui peut n’avoir rien en commun avec le thème du complotisme, mais qui vous permet (notamment) de travailler votre lien de confiance avec eux. En d’autres termes, que vous travailliez sur le thème ou sur autre chose, agir sur les idées complotistes nécessite de travailler votre relation de confiance et votre consistance avec les jeunes.
À moyen terme toujours, il est opportun de partir du principe de méfiance pour donner aux jeunes des outils d’analyse et de critique. Cela peut se faire en commençant par les inviter à appliquer ces principes aux discours dominants, discours qu’ils sont précisément en train de critiquer. Une fois les principes bien compris, l’idée est bien sûr de les inviter ensuite à les appliquer à leurs propres sources d’information, de manière à leur faire comprendre que l’esprit critique n’a pas d’exceptions.
À moyen et long terme, partager les outils critiques
À moyen/long terme, une piste plus qu’intéressante est de les accompagner dans la construction d’un ou de plusieurs objets médiatiques contribuant à la diffusion de ces outils d’esprit critique. Cela permet aux jeunes de sortir du narratif complotiste pour entrer dans un cycle d’actions réfléchi sur la communication et de remise en question.
Ressources spécifiques dans ce guide
Pour jouter ou en débattre autrement (voir Annexe 9)
THE E-LEARNING TOOL
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